SUJETS CHAUDS DE L’INNOVATION EN OPHTALMOLOGIE :
TÉLÉOPHTALMOLOGIE

Au cours des dernières années, les soins de santé virtuels ont rapidement pris de l’expansion au Canada. La Dre Vivian Yin explique leur rôle en ophtalmologie et la façon dont ils sont utilisés pour accroître l’accès aux soins oculaires. 

Dre Vivian Yin
Ophtalmologiste et oculoplasticienne
Université de la Colombie-Britannique, Vancouver (C.-B.)

Qu’est-ce que la téléophtalmologie?

La téléophtalmologie est une façon d’offrir des soins oculaires à distance à l’aide de toute forme de technologie de télécommunication ou d’équipement médical numérique. Elle permet aux ophtalmologistes de s’occuper de patients pouvant avoir un accès limité à des soins oculaires, comme les patients qui habitent dans des régions éloignées ou rurales.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur les soins oculaires virtuels

Même si la téléophtalmologie n’est pas nouvelle, la pandémie de COVID-19 a entraîné, par nécessité, l’adoption rapide des consultations virtuelles en soins oculaires. 

En raison des restrictions en matière de santé publique, les consultations virtuelles ont été encouragées et légalisées dans bon nombre de provinces et territoires.

En raison des restrictions en matière de santé publique, les consultations virtuelles ont été encouragées et légalisées dans bon nombre de provinces et territoires.

Les régies d’assurance maladie ont créé des codes de facturation des médecins pour les visites virtuelles.

Même si un grand nombre de consultations en clinique ont repris, la téléophtalmologie s’est révélée utile pour éliminer les obstacles en lien avec l’accès à des soins en personne. L’infrastructure est maintenant en place pour prendre en charge son utilisation dans les cabinets d’ophtalmologie à l’avenir.

À quoi peut ressembler un parcours habituel en soins virtuels?

Voyez comment la téléophtalmologie a été utilisée pour aider Tara, 61 ans, à recevoir les soins oculaires dont elle avait besoin.

Tara, 61 ans

Véritable patiente de la Dre Yin de Fort St. John (C.-B.)

Tara est une femme de 61 ans qui habite à Fort St. John (C.-B.). Elle a senti une masse sur son œil et a eu une vision double intermittente pendant plus d’un an. Elle est suivie par un ophtalmologiste itinérant, comme l’a recommandé son médecin de famille.

L’ophtalmologiste itinérant planifie une tomodensitométrie de ses orbites et détermine que Tara a une tumeur derrière son œil gauche, dans la glande lacrymale. Elle est aiguillée vers la Dre Yin, une oculoplasticienne de Vancouver, pour discuter des options de traitements chirurgicaux.

Tara a une consultation virtuelle avec la Dre Yin par Zoom. Pendant le rendez-vous, la Dre Yin examine les images de la tomodensitométrie de Tara (réalisée localement à Fort St. John). La Dre Yin explique à Tara que le diagnostic le plus probable est une tumeur à la glande lacrymale et suggère que Tara subisse une biopsie à des fins de diagnostic.

Tara se rend à Vancouver pour subir une chirurgie. Elle rencontre la Dre Yin juste avant la chirurgie pour pouvoir lui poser toute question supplémentaire.

La chirurgie de Tara est réalisée par la Dre Yin. Tara rentre à la maison à Fort St. John.

Le rendez-vous de suivi de Tara avec la Dre Yin se fait de façon virtuelle.

Une fois l’état de Tara considéré comme stable, ses soins sont pris en charge par l’ophtalmologiste de sa région.

Grâce à la téléophtalmologie, Tara n’a besoin de se rendre à Vancouver qu’une seule fois – pour sa chirurgie avec la Dre Yin.

« Je ne crois pas qu’un examen virtuel peut remplacer un rendez-vous en personne. Les examens virtuels sont plutôt un complément pour aider à coordonner les soins aux patients dans certains scénarios précis, de sorte que tout ce qui doit être fait puisse être organisé en un seul déplacement. »

– Dre Vivian Yin

Comment utilise-t-on la téléophtalmologie pour améliorer l’accès aux soins au niveau de la population?

La téléophtalmologie existe depuis longtemps au Canada. Plusieurs provinces ont mis sur pied avec succès des programmes de téléophtalmologie pour le dépistage et la prise en charge de maladies chez les populations éloignées et sous-desservies.

Dépistage de la rétinopathie diabétique (RD) dans le Nord de la Colombie-Britannique

Dans le cadre d’un programme qui s’est déroulé avec succès pendant de nombreuses années, la collaboration entre la communauté locale et les ophtalmologistes a été la clé de la réussite du programme de soins du diabète. La communauté des Premières Nations a pris en charge une clinique de dépistage du diabète, avec des ophtalmologistes agissant en tant qu’experts-conseils et fournissant des caméras d’imagerie, de la formation et la cueillette de données. En plus d’offrir le dépistage de maladies de la rétine, le programme a permis d’offrir des soins complets du diabète qui ont été utiles à la communauté, et le personnel infirmier et les laboratoires de proximité procédaient à des évaluations supplémentaires et à de l’éducation sur la prise en charge du diabète.

Soins du rétinoblastome en Ontario

Le rétinoblastome est la forme la plus courante de cancer oculaire chez l’enfant. Puisqu’on ne trouve des spécialistes que dans quelques centres d’excellence, l’accès aux soins demeure un problème pour de nombreuses familles touchées. L’équipe du rétinoblastome de l’hôpital SickKids à Toronto offre un service à tous les enfants atteints d’un rétinoblastome en Ontario, ainsi qu’aux enfants de l’Alberta et du Manitoba.

Centre-ville d’Ottawa

Pour contribuer à rejoindre une population hautement vulnérable d’immigrants récents à Ottawa, des caméras d’imagerie en position debout dans les centres de santé communautaire sans rendez-vous peuvent permettre aux patients de passer un examen de la vue à des moments et selon des modalités qui leur conviennent mieux, lorsqu’aucun professionnel des soins oculaires n’est disponible.

Dépistage de la rétinopathie diabétique dans le Nord et l’Est de l’Ontario

La technologie de l’intelligence artificielle (IA) sert à dépister la rétinopathie diabétique chez les populations rurales, éloignées et autochtones dans le Nord et l’Est de l’Ontario. Le système basé sur l’IA peut prendre et interpréter des images de la rétine sans qu’il soit nécessaire de faire appel à un spécialiste des soins oculaires. Les patients qui échouent le dépistage sont aiguillés vers un ophtalmologiste pour une évaluation plus approfondie et des soins.

Québec

Des programmes de téléophtalmologie ont été mis en œuvre avec succès pour servir des patients dans différentes régions, y compris des régions éloignées comme le Nunavik et des territoires cris. Ces initiatives visent à répondre aux besoins en soins de santé uniques de ces populations, en tenant compte de leur isolement géographique et de l’accès limité à des services de soins oculaires spécialisés. Puisque ces initiatives relient les patients aux ophtalmologistes, optométristes et médecins de famille, ces collectivités sous-desservies reçoivent des services critiques de soins oculaires et subissent un dépistage de la rétinopathie diabétique.

La téléophtalmologie a évolué rapidement au cours des 25 dernières années. La photographie de la rétine rudimentaire utilisée dans les premiers temps a été remplacée par une imagerie de plus en plus sophistiquée qui permet de réaliser un examen oculaire plus global, qui offre la possibilité de détecter des maladies comme le glaucome et la dégénérescence maculaire.
Quel est l’avenir de la téléophtalmologie au Canada?
Surveillance des maladies à domicile

Les nouvelles technologies permettent d’exercer une surveillance à domicile de certaines maladies comme le glaucome.

  • Les patients peuvent se servir d’un appareil à la maison pour mesurer leur pression intraoculaire.
  • Leur ophtalmologiste peut accéder aux données et s’en servir pour aider à orienter leur plan de traitement.
Cliniques oculaires virtuelles

Relier un centre situé dans une collectivité rurale à un grand centre par le biais de la téléophtalmologie pourrait contribuer à améliorer l’accès aux soins oculaires pour de nombreux Canadiens.

  • Les patients des villes éloignées pourraient se rendre dans un centre local doté d’un technicien en ophtalmologie.
  • Le technicien mesurerait leur vision, procéderait à des évaluations et obtiendrait des photos au moyen d’une lampe à fente ou d’autres techniques d’imagerie.
  • En temps réel, un ophtalmologiste pourrait virtuellement examiner les résultats d’imagerie, consulter le patient et prescrire un traitement (amorcé par le technicien).
« J’espère que la pandémie de COVID-19 nous a fait entrer dans une nouvelle ère où l’acceptation de modèles de soins virtuels uniques est plus répandue, ce qui permettra à beaucoup plus de Canadiennes et de Canadiens d’avoir accès en temps voulu à des soins ophtalmologiques de grande qualité. »
- Dre Vivian Yin